Le Delta de l'Ebre est un autre endroit insolite où évoluent les personnages de mon livre "Le secret des amaniers". L'extrait et les photos ci-dessous vous donneront une idée de la majesté du payasage.
"Dans la plaine cultivée, suivant les méandres de l’Ebre, les rizières, les lagunes se succèdent et la route se fractionne en chemins qui fendent la mosaïque de champs. L’automne confisque au delta une partie de son charme ; celui du bleuté des rizières inondées, celui des verts tendres du riz naissant, celui des jaunes avant la récolte. Seuls les oiseaux migrateurs animaient les rizières asséchées, distrayant de leur plumage la couleur terre du delta. Diego, comme un automate, circulait dans ce paysage sauvage et magnifique, le regard vide. Pourtant n’avait-il pas pris, avec enthousiasme la décision qu’il irait à ce rendez-vous? L’invitation l’avait séduit d’emblée, peut-être parce qu’elle était originale et inattendue, peut-être parce qu’il avait besoin d’amour. Juste quelques mots dans une enveloppe blanche, maintenue par un balai d’essuie-glace sur le pare-brise de son 4x4 :
«Dans les rizières du Nord, là où le fleuve, la mer et le ciel se confondent, là où les longues étendues sableuses, désertes et vierges se succèdent juste interrompues par les dunes, là où s’abrite le monarque africain, j’installerai un nid intime dans l’axe de l’île de Buda, demain à l’apogée de Râ. »
Juste quelques mots anonymes qui décrivaient de façon si fidèle le paysage de son enfance qu’ils en étaient troublants. Qui pouvait bien être l’auteur de cette invitation? Diego était persuadé qu’il devait le connaître. Comment pouvait-il en être autrement? Qui fixerait un rendez-vous dans un endroit aussi insolite que les dunes du Fangar? Qui savait qu’il aimait cette terre plus que tout?
Le pire pour Diego eut été que cette invitation émane d’une femme. Il était gay. Les expériences sexuelles qu’il avait tentées avec les femmes furent limitées et désastreuses. L’incertitude était donc dérangeante mais, l’invitation trop tentante pour qu’il la décline. Il paria que le mystérieux écrivain était un homme. Il roula aussi loin que l’on puisse rouler sur le chemin jusqu’à «La Punta». Droit devant il n’y avait qu’un bâtiment ; «El Vascos», un bistrot depuis longtemps laissé à l’abandon, et la mer solitaire, agitée.
Il parqua son véhicule sur un bas côté, derrière une carcasse rongée par la rouille et les sels marins. La carcasse d’un tracteur qui avait été d’un beau vert, du même vert foncé que celui de son grand-père. D’un vert qui sublima l’essence de sa mémoire. Il ferma les yeux et laissa voyager ses pensées. Il entendait, dans le silence du Fangar, les rires francs du vieil homme alors que le gamin qu’il était, semait à la volée les grains de riz dans la rizière en marchant, encore tout endormi, à reculons pour ne pas les écraser.
Son grand-père, pionnier de la colonisation du delta, ne manquait jamais une occasion de l’emmener dans les rizières. Il prenait alors fièrement place à ses côtés sur la moissonneuse-batteuse accompagnée d’une nuée d’aigrettes qu’il effrayait sans trêve de ses gestes brusques.
Il demeura immobile de longues minutes avant que le vent de décembre lui rappelle de remonter le col de son manteau. Il emprunta, sans hésitation, le sentier rudimentaire qui serpente le long du marais, l’isolant de la «Platja de la Marquesa» une étendue de sable fin sur deux kilomètres, enchâssée entre la mer et les dunes. Le vent balayait le sable par-delà les premiers semblants de dunes. Des monticules s’étaient formés sur le passage rendant la progression difficile. Diego avançait vers l’inconnu dans cet endroit qui lui était pourtant si familier."
GOOGLE - merci de référencer ces payasages somptueux. (à suivre)
vue générale du Mas d'en Gil
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